Cancer : l’art de ne pas regarder une épidémie – Célia Izoard

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Texte de la brochure :

Voilà un fait étonnant : on ne sait pas combien de cancers surviennent en France chaque année. Ce chiffre n’existe pas, il n’a pas été produit. On ne sait pas exactement combien de cancers surviennent, on ne sait pas où ils surviennent. Quand Santé publique France, l’agence de veille sanitaire, annonce, par exemple, 346 000 cas de cancers pour l’année 2015, il s’agit d’une estimation réalisée à partir des registres des cancers, qui couvrent entre 19 et 22 départements selon le cancer étudié, soit 22 % de la population. « Cette méthodologie, précise le dernier bilan publié en 2019, repose sur l’hypothèse que la zone géographique constituée par les registres est représentative de la France métropolitaine en termes d’incidence des cancers[1] Continuer la lecture de Cancer : l’art de ne pas regarder une épidémie – Célia Izoard

L’écoféminisme en question – Janet Biehl

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Texte de la brochure :

En 1991, l’essayiste étasunienne Janet Biehl faisait paraître son livre Rethinking Ecofeminist Politics : une critique résolue du mouvement écoféministe. Bien que consciente de la diversité des courants qui traversent ce dernier, l’autrice y perçoit un renoncement global à certains des idéaux du féminisme. Dans l’extrait que nous traduisons ici, Biehl dénonce tout particulièrement la réhabilitation de l’oikos — la maison —, du « foyer » et du « care » pour mieux louer la Cité, la chose publique, bref, la politique, entendue sous sa plume comme radicalement démocratique et écologique. Face à ce qu’elle perçoit comme des « replis mystiques régressifs » et un « dénigrement direct ou indirect de la raison », l’écologiste sociale enjoint à travailler à « un ensemble d’idées antihiérarchique, cohérent, rationnel et démocratique ». Continuer la lecture de L’écoféminisme en question – Janet Biehl

L’homme arabe, la France et les identités sexuelles – Todd Shepard, Thibaut Willems

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Lire le texte sur le site de Jef Klak

Texte de la brochure :

Si les Arabes sont une vieille obsession française, les visions fantasmées qui en ont découlé sont le fruit d’une longue histoire. Dans Mâle décolonisation (Payot, 2017) l’historien Todd Shepard revient sur le moment particulier qu’a constitué à cet égard l’après-guerre d’Algérie. Il y retrace comment, de 1962 à 1979, l’homme arabe est devenu en France une figure omniprésente dans les débats de société les plus divers, consubstantielle aux positions politiques de l’extrême droite comme de l’extrême gauche, et façonnant des mouvements de libération homosexuels et féministes. C’est à l’aune de l’étude de cette période unique que les formes contemporaines de racisme s’éclaircissent. Continuer la lecture de L’homme arabe, la France et les identités sexuelles – Todd Shepard, Thibaut Willems

Les 4 et 5 mai de Kanaky – Léopold Lambert

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Lire le texte sur le site d’Acta.zone

Texte de la brochure :

Le devoir de la nation colonisatrice de connaître le massacre d’Ouvéa et l’assassinat de Jean-Marie Tjibaou et Yeiwéné Yeiwéné.

Aujourd’hui et demain, 4 et 5 mai 2020, nous commémorons deux anniversaires traumatiques en solidarité avec le peuple kanak. Il s’agit du 32ème anniversaire du massacre colonial de Gossanah, à Ouvéa, en Kanaky ainsi que du 31ème anniversaire de l’assassinat de Jean-Marie Tjibaou, Yeiwene Yeiwene, et de la mort de Djubelly Wea, leur assassin, également à Ouvéa. De notre côté, nous membres de la nation colonisatrice, nous souvenons généralement vaguement de ces deux drames sans nécessairement les associer au présent du pays mélanésien ni à la longue histoire des insurrections kanak et plus particulièrement à celle de 1984-1988 qui vit Kanaky plus proche que jamais de mettre fin au colonialisme français. Voici donc un court récit, par Léopold Lambert, pour permettre de se souvenir des 22 révolutionnaires kanak qui perdirent la vie au cours de ces événements d’une autre manière que celle d’une « prise d’otages qui a mal tourné » comme on l’entend trop souvent dans une lecture profondément apolitique de ce massacre. Continuer la lecture de Les 4 et 5 mai de Kanaky – Léopold Lambert

Théorisation de l’accumulation primitive dans L’Impérialisme et dans La condition de l’homme moderne : Hannah Arendt, lectrice de Rosa Luxemburg — Laura Aristizabal Arango

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Lire le texte original (anglais) sur Les Cahiers du GRM

Texte de la brochure :

L’évidence d’un héritage

En 1948, paraît L’Impérialisme, deuxième tome des Origines du totalitarisme dans lequel Arendt étudie les causes et les mécanismes de la politique impérialiste européenne de la fin du 19e siècle en tant qu’elle constitue à ses yeux, au même titre que l’antisémitisme, l’un des éléments structurels du totalitarisme. Les études qui portent sur ce tome des Origines du totalitarisme ont relevé qu’Arendt construit son étude de l’impérialisme en héritant des thèses que Rosa Luxemburg avance dans L’accumulation du capital (1913) à propos de l’accumulation primitive du capital. Cette évidence vient des textes mêmes d’Arendt : non seulement dans L’Impérialisme Arendt mentionne les « brillantes recherches de Luxemburg à propos de la structure politique de l’impérialisme » mais, en outre, en 1966, Arendt consacre un texte-hommage à Rosa Luxemburg, dans lequel elle affirme, contre les critiques marxistes « orthodoxes » de Luxemburg, que L’accumulation du capital était une « description éminemment fidèle des choses telles qu’elles se produisaient en réalité ». Par la suite, de nombreux·ses commentateur·rices ont rappelé la dette d’Arendt vis-à-vis de la compréhension luxemburgienne de l’accumulation primitive. Pour n’en citer que quelques-un·es : Elisabeth Young-Bruehl remarque dans la biographie qu’elle consacre à Hannah Arendt (1999) que les thèses de Luxemburg sur l’impérialisme étaient pour Arendt un outil théorique non seulement dans la compréhension de l’impérialisme européen de la fin du 19siècle mais aussi dans celle de l’impérialisme américain au Vietnam et en Amérique latine ; David Harvey, quant à lui, situe ses thèses sur « l’accumulation par dépossession » dans une généalogie qu’il fait remonter à Rosa Luxemburg et à Hannah Arendt ; pour sa part, Anne Amiel rappelle que dans L’Impérialisme Arendt dialogue avec « l’historiographie marxienne – à commencer par Rosa Luxemburg envers laquelle elle est débitrice ».

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Si la justice exclut les animaux, elle demeure partielle — Dalila Awada Suivi de Féminisme et cause animale — Christiane Bailey et Axelle Playoust-Braure

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Texte de la brochure :

Si la justice exclut les animaux, elle demeure partielle

Dalila Awada

« C’est l’une des prochaines arènes majeures de la lutte », lançait Angela Davis en 2012 à propos de la question animale. Et de poursuivre : il est temps de mettre en place d’autres relations humaines et non-humaines. Fidèle à cette tradition émancipatrice1, la cofondatrice de l’organisation Paroles de femmes, Dalila Awada, militante féministe et antiraciste québecoise, revient avec nous sur son engagement en faveur des animaux. On a tout à gagner, avance-t-elle, à considérer que la vie humaine n’est pas la seule à avoir de la valeur — et donc à placer l’abolition de l’exploitation animale au cœur du combat collectif contre l’ordre capitaliste, sexiste et raciste.

Votre position est inconfortable, dites-vous : le mouvement animaliste fait parfois preuve de racisme et le mouvement antiraciste perçoit parfois la cause animale comme secondaire, ou comme une affaire de « bourgeois blancs ». Comment sortir de ces impasses ?

D’emblée, je précise que ce n’est pas le mouvement animaliste et le mouvement antiraciste qui sont réfractaires de part et d’autre : ce sont des parties de ces mouvements. Il y a aussi des gens qui travaillent à créer des ponts. D’autres encore ne s’en préoccupent pas, sans toutefois verser dans la décrédibilisation. Mais, de manière générale, il y a effectivement de la réticence à intégrer ces deux luttes ensemble. Je le comprends bien. Les liens sont aujourd’hui évidents pour moi parce que j’y ai consacré du temps, mais on ne nous a pas habitués à penser la cause animale et la cause antiraciste ensemble. Je crois pourtant qu’on gagne à ne pas établir une hiérarchie entre les deux : un être qui souffre est un être qui souffre. Ce n’est pas de la sentimentalité excessive de le dire : la compassion est aussi une manière pragmatique d’être au monde. Plusieurs chercheuses et chercheurs ont noté qu’une des choses qui structure à la fois le racisme et le spécisme2, c’est la minimisation, l’occultation ou le déni de la souffrance de ceux qui sont considérés différents. Et parce que leur souffrance nous touche moins, on arrive à fermer les yeux ou à justifier les injustices et les inégalités qui provoquent ces souffrances. Concrètement, s’investir dans l’une ou l’autre de ces causes est exigeant. On ne peut pas se diviser à l’infini. Une des approches qui peut être adoptée est celle de la non-agression : on peut ne pas adhérer ou ne pas vouloir y consacrer du temps, sans pour autant miner les efforts de celles et ceux qui travaillent dans d’autres mouvements.

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Rendre la police obsolète – 1 de Kristian Williams

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Lire le texte original (anglais) sur AK Press (UK)

Texte de la brochure :

Traditionnellement, à la fin d’un livre comme celui-ci, on termine par des recommandations sur ce qui pourrait rendre la police plus efficace, efficiente, moins corrompue, moins violente, etc. Ces recommandations s’adressent presque toujours aux législateurices et aux administrateurices de la police. Elles sont d’ordinaire plus techniques que politiques, c’est-à-dire qu’elles offrent un avis détaché sur ce qui, dans le sens le plus général du terme, constituent les moyens de la police – les stratégies de patrouille, de contrôle des foules, les techniques d’interrogatoire, les politiques d’usage de la force, les organigrammes, les mécanismes de contrôle interne, les moyens d’améliorer le moral des troupes, la discrimination positive – sans interroger (ni souvent même identifier) les objectifs de la police. Elles ne soulèvent pas de grandes questions sur le rôle de la police dans la société, sa nécessité ou les alternatives qui pourraient y exister.

J’approche cette conclusion d’un tout autre angle. Mes recommandations ne s’adressent pas aux personnes au pouvoir, mais au public. Elles sont volontairement politiques et évitent l’aspect technique. J’ai, au cours de ce livre, inspecté le rôle de la police, ce qu’il implique pour la démocratie et la justice sociale, et questionné à quoi servent les flics. Je vais maintenant brièvement considérer la question : est-ce que l’on peut se passer de la police ?

Remettre en cause les évidences

Dans son essai « La Manufacture du consentement », Noam Chomsky conseille : « Si vous voulez apprendre quelque chose sur le système de propagande, regardez bien les critiques et leurs présupposés tacites. C’est ce qui constitue typiquement les doctrines de la religion d’état. » Ayant cela à l’esprit, c’est intéressant de noter ce que les universitaires n’admettent pas, les possibilités qu’iels laissent hors de leur champ d’étude. Dans la bibliographie « sérieuse », le fait que la police soit une composante nécessaire de la société moderne est un présupposé presque universel.

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Justice transformatrice – Description rapide – Mia Mingus

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Lire le texte original (anglais) sur TransformHarm.org

Texte de la brochure :
Ce texte a été écrit pour une intervention sur la justice transformatrice (JT) que j’ai faite et je la partage aujourd’hui pour qu’elle serve à d’autres dans leur travail. Cela devait être une courte description pour les gens qui ne connaissent pas le cadre et l’orientation de la JT et qui n’ont pas le temps ni la possibilité de lire un document long. Ce n’est pas une histoire de la JT, ni un rappel dans le détail de chaque composante de la JT, ni même un tour complet de tout ce qui est mentionné ici. C’est une première tentative de description de quelque chose de difficile à décrire. J’espère que ce sera un point de départ, pas une conclusion et que cela sera utile à certain.es d’entre vous.

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Abolir la police ? Pour les militant.es de terrain, c’est moins absurde qu’il n’y paraît.

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Texte de la brochure :

Avant ce moment sur Fox News, Jessica Disu ne s’était jamais considérée comme étant une abolitionniste de la police. Mais le 11 Juillet, elle était sur une chaîne nationale, parmi 29 autres personnes assemblées par Megyn Kelly pour débattre des meurtres récents de Alton Sterling, Philando Castile et de plusieurs officiers de police de Dallas.

« J’avais l’impression que cela allait être une discussion riche et productive, même s’il s’agissait de Fox News », dit Disu, âgée de 27 ans, qui s’identifie comme une ‘activiste pacifiste et artiste de rap humanitaire’ et qui prend part à diverses associations pour les jeunes des quartiers sud de Chicago. Elle avait préparé son discours avant l’émission : « Ce devrait être illégal pour un agent de police de tirer sur un civil. C’était le message que je voulais faire passer. »

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Abolir la police – A sa place, instaurons l’égalité sociale, économique et politique pleine et entière.

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Texte de la brochure :

Il y a quelques semaines, il y a eu une fusillade dans mon immeuble. Cinq coups sont partis au total, ne faisant heureusement aucun.e blessé.e. J’étais chez moi lorsque cela s’est produit, mais j’habite au troisième, loin de la cible du tireur. Les jeunes d’en-bas, qui traînent dans le couloir presque tous les jours pour boire, fumer, raconter de la merde et vendre de l’herbe ont été suivi.es jusqu’à chez eulles par une de leurs embrouilles. Ce soir-là, je me souviens d’avoir entendu l’un d’eux crier « Iels m’ont eu, bro ! » – mais il semble que cela ait été dû au choc de la fusillade et à l’explosion de porte vitrée de l’immeuble qui lui ont fait croire qu’il était touché. Cela faisait peur.

Cependant, ce qui fait davantage peur encore, c’est le fait que presque tous les soirs depuis la fusillade il y a eu soit une voiture de police, garée de l’autre côté de la rue avec les lumières des gyrophares allumées, soit 2 flics de garde devant mon immeuble, juste devant les marches. C’est cette mesure qui est censé prévenir d’autres actes de violence, mais la présence de la police m’effraie davantage que les jeunes qui vendent de la drogue et les coups de fusil.

Un jour, en rentrant dans mon immeuble, en évitant de croiser le regard des deux agent.es, j’ai entendu l’un.e d’eulles dire à l’autre : « Tu veux faire une verticale ? » alors que je mettais mes clefs dans la serrure l’entrée. Une ‘verticale’, c’est quand la police entre dans un immeuble et vont de haut en bas, à la recherche de toute activité potentiellement criminelle. Je me souviens que c’est dans ces circonstances qu’est mort Akai Gurley.

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