Dans les Alpes, la neige artificielle menace l’eau potable – Marc Laimé

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Texte de la brochure :

Développée aux États-Unis dans les années 1950, la fabrication de neige artificielle s’est répandue en Europe depuis une trentaine d’années. En France, la neige de culture, utilisée sur 120 hectares au milieu des années 1980, s’étendait vingt ans plus tard sur plus de 4 500 hectares, soit 18 % de l’ensemble du domaine skiable. Depuis, l’industrie de l’or blanc n’a cessé de mettre de nouvelles installations en service, menaçant l’ensemble du cycle hydrologique naturel, et désormais jusqu’à la production d’eau potable.

Dans les Alpes, le réchauffement des températures, estimé entre 1,6°C et 2,2°C depuis 1950, s’est accéléré depuis la fin des années 1980, entraînant la fonte des glaciers et la diminution de l’enneigement au sol, à raison de vingt cinq jours de moins par an, en moyenne.

Au début des années 2010, le Conseil général de l’Isère finance à hauteur de 100 000 euros les travaux de restructuration d’une piste de ski au sein de la station de sports d’hiver de Chamrousse. La communauté de communes du Grésivaudan, à laquelle appartient Chamrousse, a pour sa part accordé à ces mêmes travaux une subvention de 450 000 euros.

Dépassant les 10 millions d’euros, le coût des aménagements, justifié par l’objectif de « diversifier et rajeunir sa clientèle », provoque en juillet 2016 une pollution des sources qui alimentent en eau potable cinq communes voisines de Chamrousse, dont Herbeys. La consommation de l’eau du robinet est interdite durant près d’une semaine.

Pour réaliser ces travaux de grande ampleur, terrassements, défrichage, construction de bâtiments etc, la société des remontées mécaniques de Chamrousse n’a pas craint d’enfreindre une Déclaration d’utilité publique (DUP), qui interdit précisément tous les aménagements précités dans cette zone située, pour l’essentiel, dans les périmètres de protection immédiate et rapprochée des sources de Fontfroide.

Nullement rebutée par l’incident, la commune de Chamrousse, soutenue par la Caisse des dépôts et consignations, se lance, un an plus tard, dans un vaste projet de « requalification urbaine et développement économique du secteur du Recoin », qui menace à nouveau la pureté des sources de Fontfroide. En effet, la « retenue collinaire » de la Grenouillère va alimenter pour partie l’usine de fabrication de neige artificielle, à partir d’une eau de qualité médiocre. La raison : en infraction, là encore, avec un arrêté préfectoral de 2009 qui a autorisé sa construction, la Grenouillère est alimentée, non seulement par l’eau de deux ruisseaux — conformément au texte —, mais aussi par des eaux de pluie et de ruissellement, ce que l’arrêté ne prévoit nullement.

Ainsi, la retenue contribuera à fournir de l’eau pour des canons à neige d’ores et déjà implantés tout au long de la piste Olympique, jusqu’au périmètre de protection rapprochée des captages. Signalons au passage que, alors que la station compte d’ores et déjà deux « retenues collinaires » le lac des Vallons et la Grenouillère, chacune d’une capacité de 45 000 mètres cubes, la commune de Chamrousse envisage la construction d’une troisième retenue, dans le secteur de Roche Béranger, qui doublerait à elle seule la capacité de stockage.

Ainsi, dans un premier temps, et à l’issue d’une enquête publique menée au pas de charge, et en catimini, en 2016, la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), la Direction départementale des territoires (DDT) comme l’Agence régionale de santé (ARS) ont fait à plusieurs reprises référence à la DUP de 1995 pour finalement accorder, à l’unisson, leur aval aux travaux précités… pourtant strictement interdits par ce texte censé être protecteur. Mais lorsque les habitants d’Herbeys et des communes voisines mesurent la situation, les délais de recours devant la justice administrative sont déjà dépassés.

Ce n’est pas le cas lors de la nouvelle enquête publique sur les projets concernant le Recoin, dont les conclusions sont attaquées en mars 2018 devant le Tribunal administratif par l’Association de sauvegarde des eaux de Casserousse (ASEC), une association de riverains créée après les travaux de restructuration de la piste de Casserousse et l’épisode de pollution. Deux cent personnes se mobilisent. Leur action paraît d’autant plus légitime que Grenoble-Alpes Métropole, gestionnaire des captages depuis janvier 2015, a fait parvenir à la Commissaire-enquêtrice une note dans laquelle la collectivité exprime ses inquiétudes quant aux répercussions du projet sur la qualité de l’eau potable.

À raison, comme le souligne Jacques Derville, résident de la commune d’Herbeys et président de l’ASEC : « En décembre 2016, l’hydrogéologue-agréé mandaté par l’ARS écrivait dans son rapport final consacré aux mesures complémentaires exigées par la pollution persistante des sources : “Cette retenue [la Grenouillère] doit être considérée comme une ressource sensible.” »

L’alimentation de la Grenouillère par les eaux de pluie et de ruissellement est déjà effective, en violation de l’arrêté préfectoral de 2009, des engagements de Chamrousse, et des préconisations de l’hydrogéologue-expert mandaté par l’ARS. Or la commune de Chamrousse a saisi l’opportunité des travaux au Recoin pour attribuer à la Grenouillère un rôle central : – « Le bassin collecte naturellement les ruissellements du secteur ». – « Les eaux stockées dans le bassin de la Grenouillère sont pompées et refoulées vers le lac des Vallons, lequel alimente le réseau d’enneigement artificiel de la station ». – « Le système des eaux pluviales déjà mis en place (…) permettra de diriger la quasi totalité des eaux de ruissellement du Recoin vers le bassin de la Grenouillère ».

Et que nous apprend le compte-rendu du conseil municipal de Chamrousse du 3 octobre 2017, destiné à lever les réserves de la Commissaire-enquêtrice ? Que le dispositif de traitement par phytoépuration n’est pas sûr, d’une part. Que la pollution du bassin risque d’être sévère puisque la commune reconnaît que « la fauche annuelle du filtre pourrait être évacuée suivants (sic) les teneurs accumulés (sic) dans les plantes », d’autre part.

L’eau stockée dans le bassin de la Grenouillère sert donc à fabriquer de la neige de culture, une neige qui sera ensuite dispersée jusqu’au bas de la piste olympique, à l’intérieur du périmètre de protection rapprochée du captage… Les sources se trouvent par conséquent exposées au risque d’une nouvelle pollution, ne serait-ce qu’à l’occasion d’une contamination accidentelle de l’eau utilisée pour la neige artificielle.

Dans un rapport de l’AFFSET daté de 2008, les risques permanents liés à l’usage de la neige artificielle étaient déjà soulignés :

« Considérant la vulnérabilité aux pollutions des aquifères et des captages d’eau potable en zone de montagne, notamment ceux localisés au sein des domaines skiables, voire à proximité immédiate des pistes, les experts mentionnent que la fonte d’une neige de culture de mauvaise qualité microbiologique peut impacter la qualité sanitaire de l’eau destinée à la production d’eau destinée à la consommation humaine ».

L’association décide aussi d’adresser un « recours hiérarchique » à la ministre de la santé, Mme Agnès Buzin, et demande à M. Olivier Véran, neurologue, député grenoblois LREM et rapporteur général du budget des affaires sociales, de bien vouloir le transmettre au cabinet de la ministre. Contenant des critiques en règle de l’ARS, ce courrier ne quittera jamais Grenoble. Un autre recours, adressé cette fois à M. Nicolas Hulot, tout aussi critique à l’égard des services de l’État, subira le même sort.

Dans le même temps, en réponse à un courrier du député, l’ARS ne craint pas d’affirmer, dans une lettre signée par le préfet, que ce qu’il convient de faire désormais, c’est de… veiller à la bonne application de la DUP de 1995 ! Eu égard aux lenteurs de la justice administrative, les usagers décident dès lors de déposer, à la rentrée 2018, une plainte devant la justice pénale. Pour l’étayer, ils sollicitent la communication des résultats d’analyses effectuées dans la retenue d’eau concernée, dite de la Grenouillère.

Un document révélateur. Il mentionne plusieurs points de prélèvements « dans le lac », en omettant de préciser où Ils sont précisément situés. On espère que ce n’est pas à proximité d’un des deux ruisseaux alimentant la retenue, comme le tuyau d’alimentation collectant les eaux de ruissellement du Recoin de Chamrousse, tuyau qui y a été installé en dépit de l’avis négatif de l’hydrogéologue agréé et mandaté par l’ARS elle-même.

Autre étrangeté, ledit rapport mentionne que l’analyse des prélèvements effectués atteste que l’eau est conforme à la « qualité baignade », alors même qu’un panneau bien en évidence au bord de la retenue stipule… que la baignade y est interdite. Et sans compter que les critères de qualité des eaux de baignade n’ont rien à voir avec ceux de l’eau potable.

Là encore, l’ARS n’y trouve rien à redire, et se montre très rassurante, alors qu’un profane voit immédiatement que plusieurs résultats sont « en dehors des clous » et paraissent inquiétants pour la santé publique. Nos usagers découvrent ensuite que les prélèvements effectués à la demande de l’ARS ont en réalité été effectués par un laboratoire privé, mobilisé par Veolia qui gère l’eau potable dans la station.

Début décembre 2018, l’association d’usagers sollicite l’ensemble des acteurs concernés pour organiser une réunion publique dans le village d’Herbeys, afin d’y évoquer les risques de pollution de l’eau par la neige artificielle. Dans les quarante-huit heures qui suivent, l’ARS et les services de l’eau de Grenoble-Alpes-Métropole lui adressent les éléments qu’elle réclamait en vain depuis de longs mois, précisant de surcroît que le nombre d’analyses sera sensiblement augmenté, et porté à… un prélèvement par mois en période de fonctionnement des canons à neige.

L’environnement au risque
de l’artificialisation

En 2016, les stations de ski françaises diffusaient déjà l’équivalent de 600 litres de neige artificielle par seconde pour produire 19 millions de mètres cubes de neige artificielle chaque année. Le procédé est simple : il consiste à expulser de l’eau dans l’air ambiant par l’intermédiaire de canons à neige ou de perches lorsque la température est négative, afin qu’elle se transforme en cristaux de glace avant d’atteindre le sol.

Pour ce faire, l’eau est mise en contact avec des « germes »[1] fabriqués en mélangeant eau et air comprimé. Le liquide va alors se fractionner en micro gouttelettes qui vont rapidement geler. Elles doivent être minuscules, environ 0,5 mm, pour pouvoir geler le plus vite possible. Et ce sont ces cristaux que l’on va mélanger à nouveau avec de l’eau pour la faire geler elle-même. Le résultat sort des canons à neige sur les pistes.

Le fonctionnement des canons mobilise de très importantes ressources en eau. Il faut 1 mètre cube d’eau pour 2 mètres cube de neige, ce qui, pour un hectare de neige fabriquée sur une épaisseur de 60 cm, nécessite 4 000 mètres cubes d’eau, soit un peu moins de deux piscines olympiques à l’hectare. Ces installations sont tout aussi gourmandes en énergie : 10 000 canons à neige consomment 108 millions de kWh[2].

La production à cette échelle nécessite donc d’énormes quantités d’eau et d’énergie. Cela nécessite de construire des canalisations, des centrales, installer des canons le long des pistes, engendrant de très lourds investissements, avec un impact majeur sur la ressource en eau. Deux solutions s’offrent aux collectivités : soit créer des retenues d’eau, aux dépens de zones humides, soit prélever dans les barrages ou les lacs de montagne au risque d’entrer en conflit avec d’autres usages de l’eau. Sachant qu’il fait parfois trop chaud pour que les canons à neige puissent fonctionner correctement.

Les premiers canons sont apparus dans les Vosges à la fin des années 1960. Mais c’est surtout à partir du début des années 1990, après trois hivers sans neige, que les stations ont commencé à s’équiper massivement.

En 2009, un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) estimait à 20 % le nombre de pistes équipées de canons à neige. « Cette dynamique s’est non seulement poursuivie mais accélérée, assure Pierre Spandre, chercheur à l’Irstea. Dorénavant, 30 % des surfaces de pistes sont équipées, et d’après nos estimations, ce chiffre devrait grimper à plus de 40 % en 2020. »

Pour éviter des conflits autour de la ressource en eau, les nivoculteurs ont trouvé la parade : la multiplication de « retenues collinaires », qui stockent l’eau de pluie ou de ruissellement depuis la saison précédente.

Une étude de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, portant sur plus d’une centaine de stations dotées de canons à neige, a confirmé que cette eau est puisée pour moitié dans des retenues artificielles aménagées à cet effet — les « retenues collinaires » alimentées par des ruisseaux ou par pompage —, mais aussi, pour 30 %, dans les cours d’eau eux-mêmes et, pour les 20 % restants, dans les réseaux d’eau potable. Même si les cas de pénurie d’eau demeurent rares jusqu’à présent, cette situation risque de conduire à des difficultés d’approvisionnement pendant la saison hivernale, au moment où les cours d’eau sont à l’étiage et où la fréquentation touristique des stations culmine, selon nombre d’experts.

S’il fallait à l’avenir enneiger l’ensemble du domaine alpin, ce sont en effet près de 100 millions de mètres cube qui devraient être mobilisés, l’équivalent de la consommation annuelle d’une agglomération de 1,5 million d’habitants.

Or la multiplication de ces bassins d’altitude n’est pas sans conséquences. Portant atteinte au paysage, ces retenues sont souvent construites sur des zones humides, dont l’utilité pour le bon fonctionnement des écosystèmes est reconnue. « Construites sur des terrains qui ne sont pas forcément stables, ces retenues peuvent présenter des risques pour la sécurité en cas de défaut de surveillance », ajoute Michel Badré.

Paul Voirin, résident dans la petite station de Carroz d’Arrache, s’interroge quant à lui sur d’autres sources de pollutions potentielles :

« Certains captages d’eau de notre commune sont situés à proximité des pistes et ne semblent avoir nécessité jusqu’à aujourd’hui aucune obligation de contrôle spécifique lié à ce type d’activité.

Étant moi-même “ski-man”, je me rends bien compte de la quantité importante de paraffine et autres produits d’entretien que je mets sur les skis. Depuis quelques années, on trouve des farts à base de graisse animale mais leurs effets sur la santé et l’environnement sont-ils vraiment meilleurs que les farts “classiques” ? De plus, leur usage reste minoritaire à ce jour.

Par ailleurs, les remontées mécaniques de la station nécessitent l’utilisation de graisses qui se dispersent progressivement dans l’environnement, d’où le besoin de graisser régulièrement. L’usure des pièces, notamment les galets, crée de la poussière qui s’infiltre dans les sols. Ces deux éléments sont d’ailleurs clairement visibles l’hiver avec les traces noires présentes sous les pylônes de télésiège.

On peut également penser aux explosifs utilisés par les pisteurs ou encore les polluants émis par les dameuses (graisses et résidus de carburant, poussières d’usure des matériaux, etc.)

Toutes ces sources potentielles de pollution devraient conduire à s’interroger quant à la qualité de nos ressources en eau. »

2016 : Laurent Wauquiez investit 50 millions d’euros dans la neige artificielle

La région Auvergne Rhône-Alpes va investir 50 millions d’euros dans les six ans à venir pour aider les stations de ski à équiper leurs pistes en enneigement artificiel, annonçait-elle le 2 mai 2016.

« L’objectif, c’est de générer un plan d’investissement sur la neige de 200 millions d’euros. La région apportera 50 millions sur la durée du mandat, dont 10 millions en 2016 », déclarait à l’AFP Laurent Wauquiez, président (LR) de la région, à l’occasion du lancement du plan « neige stations » à Lans-en-Vercors (Isère). La région financera 25 % des investissements portant sur l’enneigement artificiel et proposera aux départements de faire de même. « L’Isère a donné son accord pour apporter un euro à chaque euro versé par la région », précisait Laurent Wauquiez.

En France, un tiers des pistes environ sont équipées en canons à neige, soit deux fois moins qu’en Autriche, précisait Domaines skiables de France (DSF), qui fédère plus de 200 opérateurs de remontées mécaniques dans l’hexagone. Faute de neige, beaucoup de stations n’avaient pas pu ouvrir les pistes lors des dernières vacances de Noël, hormis les stations d’altitude et celles équipées en neige artificielle.

Pour Laurent Wauquiez, il s’agit de « soutenir les stations modestes qui, si elles n’ont pas d’enneigeurs, sont condamnées » en raison du réchauffement climatique. « On croit vraiment à la vocation du ski dans la région. On est la région qui doit défendre la montagne en France », poursuivait le président de l’exécutif régional, parlant d’une « rupture très claire » avec l’ancienne majorité de gauche qui prônait le tourisme doux sur quatre saisons.

« Nous, on faisait le plan montagne 2040. Eux, c’est la version 1970. C’est de la rétro innovation », réagissait Claude Comet, ancienne conseillère régionale écologiste chargée de la montagne, citée dans Le Dauphiné Libéré. En mars, la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, présidée par Christian Estrosi (LR), avait pour sa part annoncé un plan de 100 millions d’euros « afin de créer la nouvelle génération des stations de demain  », qui comprend notamment les équipements en neige.

Une sévère mise en garde de la Cour des comptes

Dans son rapport annuel rendu public en février 2018, la Cour des comptes constatait que ses précédentes recommandations émises en 2011 à l’adresse des stations de ski ont été « peu entendues ». Confrontés au déficit de neige, les gestionnaires ne miseraient pas suffisamment sur le développement durable. Partant d’un constat connu de tous, elle rappelle que la température moyenne enregistrée au Col de Porte a augmenté de 1,3 degrés en 50 ans. Chaque décennie, la hauteur moyenne de neige y diminue de 11,6 centimètres.

La Cour a étudié la gestion de 17 stations des Alpes du Nord, dont quatre situées en Isère : Les Deux-Alpes, Villard-Corrençon, Autrans-Méaudre et Saint-Pierre-de-Chartreuse. Selon elle, les gestionnaires privilégient trop souvent le cour terme et mettent en oeuvre des réponses « inadaptées » face au réchauffement climatique. L’installation de canons à neige notamment représente « une solution partielle et onéreuse ». Et si les enneigeurs sécurisent l’enneigement des stations d’altitude, soumises par ailleurs à une forte concurrence, on ne peut pas en dire autant des stations de basse et moyenne montagne : ici les canons ne permettent « au mieux et à un coût très élevé, que la préservation d’un enneigement minimal » sans pour autant dissuader les skieurs d’aller voir plus haut.

Cette stratégie soulève aussi la question de l’approvisionnement en eau, selon le rapport, où sont cités les chiffres de Villard-Corrençon : durant l’hiver 2014-2015, 117 000 mètres cube d’eau potable ont été utilisés pour produire 292 000 mètres cubes de neige.

Toujours sur le volet environnemental, la Cour déplore dans le rapport l’absence de réflexion sur les alternatives à la voiture pour accéder aux stations. Sur ce point, les auteurs reconnaissent que le législateur n’encourage pas vraiment de telles démarches. Soulignant que le marché du ski est arrivé à maturité, elle pointe aussi le fait que les jeunes générations skient moins que leurs aînés. À l’avenir, le ski et les sports de neige ne seront « plus l’unique ressource » des stations qui devront donc s’adapter en proposant d’autres activités tout au long de l’année.

C’est particulièrement vrai pour les stations de faible altitude déjà fragilisées par le déficit d’enneigement des dernières saisons. La Cour encourage donc les stations les plus vulnérables face au changement climatique comme Saint-Pierre-de-Chartreuse à « envisager une reconversion plus complète de leur offre touristique ». Il convient donc de diversifier les activités tout au long de l’année. Les sages déploraient enfin une « asymétrie dans les relations » entre les autorités organisatrices d’un côté (essentiellement des petites communes), et les gestionnaires (des entreprises privées). En clair, les élus locaux n’ont pas assez de poids face aux géants de l’industrie des remontées mécaniques comme, par exemple, la Compagnie des Alpes. En 2011 déjà, la Cour des comptes enjoignait aux communes de se regrouper. Une préconisation pas suffisamment suivie, constatent les auteurs du dernier rapport.

L’Isère va investir à nouveau massivement dans la neige artificielle

Le 11 décembre 2018, le président du département de l’Isère organisait à grands sons de trompe une conférence de presse à Grenoble, afin d’y présenter les résultats d’une étude diligentée par les cabinets IRSTEA-CEN, KPMG et Natura Scop. Intitulée « Perspectives d’enneigement et impacts sur les stations iséroises à l’horizon 2025-2050 », ses objectifs sont sans équivoque :

« La démarche responsable et innovante initiée par le Département [a] pour objectif d’accompagner les stations de sports d’hiver dans leur adaptation aux défis environnementaux et économiques majeurs.

Unique en France, l’étude s’est déroulée d’avril 2017 à octobre 2018 dans les 23 stations de l’Isère. Elle a pour but d’étudier la pertinence des projets de neige de culture sur la base des projections d’enneigement des stations, de la disponibilité de la ressource en eau et des équilibres financiers. Elle comprend trois volets distincts : – l’analyse des conditions d’enneigement des domaines skiables de l’Isère et une étude sur l’évolution de ces conditions à échéance 2025 et 2050 en s’appuyant sur les scénarios du GIEC[3], étude menée par l’IRSTEA[4] et Météo France-CNRS-Centre d’Etudes de la Neige[5]. – l’évaluation de l’impact actuel et futur de la production de neige de culture sur la ressource en eau et les milieux en Isère, réalisée par la coopérative Natura Scop. – les enjeux et la faisabilité économiques de la neige de culture en Isère : une analyse de la capacité des stations à porter financièrement le coût des installations liées à la neige de culture, étude réalisée par le cabinet KPMG. »

On notera que des organismes publics comme Météo-France, le CNRS et l’IRSTEA prêtent la main à une apologie du véritable désastre environnemental que constitue l’extension forcenée de la neige artificielle dans toutes les stations de ski alpin.

Une soumission qui fait écho au sort réservé à l’hydrologue Carmen de Jong il y a quelques années. Directrice scientifique à l’Institut de la montagne, dont les travaux font autorité parmi ses pairs, elle fut évincée de son programme de recherche par le président de l’Université de Savoie en 2010, qui n’eut de cesse de l’intimider et de décrédibiliser ses travaux sur la neige artificielle. Son unité de recherche a été supprimée par le CNRS et son salaire amputé des deux tiers, sans qu’elle n’ait eu la possibilité de se défendre. Il faut dire qu’avec une université toujours plus dépendante des financements privés, qui a soutenu la candidature d’Annecy pour les jeux olympiques, il est difficile pour une chercheuse de s’attaquer au lobby de l’or blanc.

Dans ce contexte les conclusions de l’étude du département de l’Isère sont bien évidemment sans surprise.

« Innovante et unique en France, (la démarche) apporte des données scientifiques, et financières, des éléments concrets et objectifs pour accompagner chaque station iséroise dans son développement futur. Et permet de répondre aux problématiques rencontrées dans l’élaboration des stratégies de développement des stations.

(…) L’analyse montre qu’en 2025 la surface équipée en Neige de Culture passera à 42 % contre 27 % actuellement. D’une façon générale, à l’échelle de l’Isère, les équipements en neige de culture envisagés sur les domaines skiables d’ici 2025, permettraient de maintenir un niveau d’enneigement en 2050 similaire à celui d’aujourd’hui.

Concernant la ressource en eau, la production de neige de culture se concentre en amont de la saison en prévention et préparation de la saison et ce, quel que soit l’enneigement à venir. Avec les projets en cours, la capacité de stockage des retenues d’altitude serait multipliée (extension, création) par deux entre 2017 et 2025. Aujourd’hui et dans les années à venir, il y a peu de réels conflits d’usage sur la ressource en eau sur le département de l’Isère.

L’analyse financière montre de son côté que les très grandes stations sont en capacité de financer les investissements prévus en sécurisant leur chiffre d’affaires et leurs marges actuelles. Pour les autres stations, la réalisation des investissements passera par des choix stratégiques de priorisation des investissements.

Les stations de sports d’hiver jouent un rôle essentiel dans l’économie touristique du département. La montagne, à elle seule, concentre 60 % du chiffre d’affaires annuel des entreprises touristiques iséroises dans les secteurs de l’hébergement et des activités de loisir. La consommation annuelle dans les stations s’élève à près de 500 millions d’euros.

En Isère, 23 000 emplois directs et indirects sont liés à l’activité touristique. En montagne, ce sont 53 % des emplois qui sont liés au tourisme. À eux seuls, les domaines skiables de l’Isère ont enregistré 4,8 millions de journées skiées lors de l’hiver 2017/2018, pour une recette de 123,1 millions d’euros (+5 % par rapport à la moyenne des quatre dernières saisons), soit 9 % de l’activité nationale. »

« Nous avons affaire à un argumentaire à sens unique en faveur d’investissements massifs dans les stations iséroises, pour la production de neige artificielle, alors même que des dizaines de millions d’euros ont déjà été engagés pour la période allant jusqu’en 2025 ! Et ils s’ajoutent aux financements très conséquents de la Région Auvergne Rhône Alpes et à la contribution budgétaire des stations elles-mêmes », réagit Jacques Derville, résident du village d’Herbeys et président de l’Association de sauvegarde des eaux de Casserousse.

L’étude fait ainsi largement l’impasse sur les aspects environnementaux de la question. Cela en dit long sur l’absence de conscience écologique, hormis dans les luxueuses plaquettes d’autopromotion de certaines stations, d’ailleurs non exemptes d’enjolivements. Ensuite, grâce aux canons à neige, « et à condition d’investissements »« l’impact du réchauffement climatique serait quasi nul jusqu’en 2050 ». Si un « indice de viabilité », opportunément forgé pour l’occasion, nous le dit, soyons rassurés , notre argent est bien placé, pour au moins 30 années ! La conciliation des usages, avec la consommation humaine, les besoins de l’agriculture, le débit des rivières, la pêche, etc., aucun souci, là non plus. « Compte tenu des projections climatiques, il y aura peu de conflits d’usage et de tension sur l’eau en Isère. Du moins jusqu’en 2050. » Une assertion fantaisiste questionnée par la récente validation, en présence du Préfet, du Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) Drac-Romanche, un document on ne peut plus sérieux, volumineux et très interrogatif sur la question.

Quant au risque de manque d’eau, on pourrait tout bonnement l’écarter… Qu’en pensent les préfets des départements alpins qui ont pris, à différentes reprises en 2018, des arrêtés à titre préventif pour tenir compte de l’état de sécheresse de divers territoires ?

Et financièrement ? Selon l’un des consultants associé à l’étude : « Les très grandes stations sont en capacité de financer les investissements prévus en sécurisant leur chiffre d’affaires et leurs marges actuelles ». Traduire : en augmentant leurs tarifs, déjà prohibitifs pour la clientèle ordinaire. Pour les plus petites stations – merci de penser au populo -, « la réalisation des investissements passera par des choix stratégiques de priorisation des investissements ». Comprendre, pour ceux qui ne captent pas la novlangue : une fois les besoins des stations de ski satisfaites, il faudra tailler dans des secteurs moins prioritaires. La santé, l’éducation, les transports, l’éducation, la culture par exemple ? »

Dans tous les cas, axer tous les investissements vers les sports d’hiver alors que le tourisme l’été représente plus de 50 % des nuitées en montagne pose question. L’enneigement artificiel augmente l’emprise des stations sur la nature, ce qui est contre productif pour un tourisme montagnard hors ski de plus en plus important.

Crise de l’eau en Haute Savoie

En Savoie, sur soixante stations de ski, qui totalisent 46 % des recettes des exploitants de remontées mécaniques en France, quarante-neuf sont équipées en installations de neige de culture. Les « retenues collinaires » – ou retenues d’altitude – d’une capacité moyenne de 65 000 m3, concernent vingt-neuf sites. À la mi-décembre 2018, cette fois, c’est à Avoriaz, autre station prestigieuse du département voisin de la Haute-Savoie, que l’état d’alerte est proclamé. Comme les retenues d’altitude utilisées traditionnellement pour fabriquer de la neige artificielle manquent d’eau, et que la production de neige de culture, qui démarre traditionnellement en novembre, n’a pu s’effectuer, le service des pistes a jeté son dévolu sur un lac destiné à alimenter la station en eau potable.

Les trois retenues d’altitude du domaine skiable sont alimentées grâce à la fonte du printemps. La première se situe à Montriond (46 000 mètres cubes d’eau) et les deux autres à Morzine (84 000 mètres cubes). La station dispose également d’une autorisation préfectorale de prélever de l’eau dans le lac de Montriond dans la limite de 120 000 mètres cubes, à condition que le niveau du lac n’atteigne pas une certaine limite. Mais ce lac naturel n’est pas étanche. La sécheresse de l’été a interdit son remplissage. Le service des pistes de la société d’exploitation des remontées mécaniques de Morzine-Avoriaz (Serma) n’a donc pas pu puiser dans le lac durant l’automne pour débuter l’enneigement du domaine.

Il a donc fallu organiser un nouveau plan d’enneigement pour l’hiver sur le secteur de Montriond mais aussi celui de Morzine. « On ne sait pas si les retenues pleines aujourd’hui se rempliront demain », confiait Thomas Lemasson, directeur adjoint du service des pistes à l’hebdomadaire local Le Messager. En effet, l’eau qui se trouve dans les retenues côté Morzine ne peut être transférée côté Montriond car « elle doit retourner sur le bassin-versant d’où elle vient ».

La solution ? Réduire les secteurs d’intervention des enneigeurs. La moitié des pistes seront enneigées artificiellement à Montriond et les deux tiers à Morzine. « Nous avons choisi de miser sur la qualité de la neige donc nous attendons qu’il fasse très froid et peu humide. C’est un pari risqué car la date d’ouverture approche », poursuit Thomas Lemasson. Les enneigeurs n’ont donc commencé à fonctionner qu’à partir du 27 novembre, mais les basses températures n’ont pas permis de fabriquer de la neige tous les jours.

Autre front, l’alimentation de la station en eau potable, assurée par Suez. Comme l’autorité préfectorale n’a pas jugé bon de prendre un arrêté autorisant la réquisition de l’eau des retenues d’altitude afin d’alimenter les réseaux d’eau potable dans le Chablais, l’opérateur privé s’est retrouvé en difficulté. Il dispose de deux lacs destinés à alimenter la station d’Avoriaz en eau potable en février, lorsque les besoins sont les plus importants. Mais l’un des deux, « Lac 2000 » a du être vidangé pour une opération de maintenance en juin dernier.

La sécheresse prolongée n’a pas permis qu’il se remplisse à nouveau. Suez a donc du demander aux services des pistes de transférer le surplus d’eau du lac « 1730 » vers le lac « 2000 ». Le pompage s’est effectué, via le réseau de neige de culture, durant neuf jours mi-novembre. Pendant ce temps, la station n’a pas pu faire fonctionner ses enneigeurs et préparer les pistes pour l’hiver. « Ça nous a pénalisés mais on ne pouvait pas faire les deux en même temps, précise Thomas Lemasson. Mais c’est normal de prêter main forte au gestionnaire d’eau potable. C’était la priorité. Aujourd’hui, nous devons partager nos ressources. Nous ne pouvons pas garder l’eau destinée à la neige de culture pour nous. En période de crise, on doit partager. »

Les Pyrénées de moins en moins enneigées

Pas de répit non plus dans les Pyrénées. Publié à la mi-novembre, un rapport de l’Observatoire pyrénéen du changement climatique, rédigé par une centaine d’experts, recense les répercussions du réchauffement des températures planétaires sur cette « biorégion » où les températures moyennes ont déjà augmenté – mais de manière irrégulière –, de 1,2°C par rapport à 1950. Cette hausse moyenne du mercure sous l’effet du changement climatique n’est pas sans effet sur les phénomènes météorologiques. Concernant les précipitations, les volumes annuels ont baissé d’environ 2,5 % par décennie sur la même période, surtout en hiver et de manière plus importante sur le versant sud.

« Dans les Pyrénées centrales, à une altitude de 1800 mètres, l’épaisseur moyenne de la neige pourrait diminuer de moitié d’ici 2050 selon la référence actuelle, tandis que la période de permanence de la neige au sol réduirait de plus d’un mois », précisent les scientifiques. Car la fonte des glaciers pyrénéens, également observée dans les Alpes, semble désormais irréversible : entre 1984 et 2016 plus de la moitié des glaciers comptabilisés au début des années 80 ont ainsi disparu. »

L’alternative : une nouvelle
hydro-solidarité

Chacun s’accorde sur le caractère inéluctable des nouvelles tensions qui vont découler du changement climatique. Les températures ne vont pas cesser d’augmenter ; la diminution de l’enneigement et la fonte des glaciers vont ainsi perturber les régimes hydrauliques des grands fleuves européens qui ont leurs sources essentiellement dans les Alpes, ceci à une échéance annoncée de quarante à cinquante années.

Les précipitations qui tombent aujourd’hui sous forme de neige tomberont sous forme de pluie, ce qui augmentera le risque d’inondations à l’aval en période hivernale, tandis que la disparition de la masse glaciaire engendrera une baisse conséquente des niveaux d’eau à la fin de l’été. Le niveau des barrages en sera naturellement affecté, entraînant une baisse de la production d’hydroélectricité évaluée à 15 % en moyenne. Tous les acteurs concernés devraient donc rapidement anticiper un changement de pratiques. Les montagnards sont ainsi incités à économiser l’eau et à trouver tous les moyens de la stocker avant qu’elle ne s’échappe trop rapidement vers les plaines.

Il faudrait dès lors élaborer de nouvelles stratégies de stockage, ce qui passe par la redécouverte que les lacs, les tourbières, la forêt, les pâturages ou certaines formes de pratiques agricoles favorisent le stockage de l’eau, ou en ralentissent a minima l’écoulement vers les plaines, ce qui dessine une opportunité pour réinventer une nouvelle utilisation du sol. Il s’agirait de passer d’une logique réparatrice des milieux naturels à des procédures solides de prévention, et de prendre en compte les milieux aquatiques en préalable à l’aménagement du territoire. Ce qui permettrait de passer de la culture du « jour d’après » la catastrophe à la culture du « jour d’avant ».

Mais le développement de cette nouvelle culture a un coût que les communautés montagnardes entendent partager avec les habitants des plaines. Il ne s’agit plus de demander des compensations, mais bien l’identification des services rendus, et qu’ils soient à l’avenir rémunérés à ce titre.

Il s’agirait donc de développer une nouvelle forme « d’hydro-solidarité » par des mécanismes financiers compensatoires aux aménagements, à l’instar de la taxe sur les espaces naturels sensibles prélevée par les départements sur toutes les constructions. Une fiscalité qui permettrait d’instaurer une solidarité des plaines vers les montagnes et reconnaîtrait le rôle stratégique des politiques de gestion de la ressource en altitude. Il reste toutefois à faire partager cette conviction au-delà des massifs alpins, car la Directive-cadre européenne sur l’eau n’a pas traité la question de la montagne, et la Commission européenne n’a qu’une vision très lointaine de celle-ci, celle d’un territoire qui dispose de ressources propres importantes : la neige, mais jusqu’à quand ?

Cette nouvelle hydro-solidarité suppose surtout d’en finir avec les mirages de l’or blanc. Nous n’en prenons pas le chemin.

 

 

Sources

« La neige de culture pèse sur l’eau et la biodiversité », Le Monde, 27 décembre 2008.

« Neige de culture. Etat des lieux et impacts environnementaux. Note socio-économique », Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), 162 pages, juin 2009.

« La gestion du domaine skiable en Rhône Alpes » (PDF), Rapport public annuel, Cour des comptes, février 2011.

« Non coupée et très addictive », Le Postillon, n° 25, été 2014.

« L’argent de la neige », 52’, Pascal Carcanade, Artkine Films, 2014.

« Les stations de ski « accros » à la neige artificielle », Emmanuelle Réju, La Croix, 23 février 2016.

« Boire de l’eau ou skier, faudra-t-il bientôt choisir ? », Barnabé Binctin, Bastamag, 28 novembre 2017.

« Le poids économique du tourisme en Isère », Isère tourisme – données 2017 et Domaines skiables de France.

« Les stations de ski des Alpes du nord face au réchauffement climatique : une vulnérabilité croissante, le besoin d’un nouveau modèle de développement » (PDF), rapport public annuel, Cour des comptes, février 2018.

« Le changement climatique dans les Pyrénées : impacts, vulnérabilités et adaptation », Rapport de l’Observatoire pyrénéen du changement climatique, novembre 2018.

« En Haute-Savoie, la station d’Avoriaz s’adapte au manque d’eau », Le Messager, 8 décembre 2018.

« L’Isère fixe un cap pour la neige de culture », Le Dauphiné Libéré, 12 décembre 2018.

« Changement climatique : les Pyrénées de moins en moins enneigées », Florian Bardou, Libération, 13 décembre 2018.

« L’année 2018 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France métropolitaine », Le Parisien, 22 décembre 2018.

« Stations de ski dans les Hautes Pyrénées : s’unir pour survivre », AFP, 26 décembre 2018.

« Victimes du réchauffement, les stations de ski misent sur les canons à neige », Le Parisien, 1er janvier 2019.

« Faute de neige, début de saison de ski au ralenti dans les Pyrénées », AFP, 3 janvier 2019.

« Sports d’hiver : les stations en ordre de bataille face au péril jeune », AFP, 7 janvier 2019.

 

 

DROIT DE RÉPONSE DE LA COMMUNE DE CHAMROUSSE

Monsieur Laimé prétend, sans apporter la moindre preuve, que la Commune de Chamrousse aurait enfreint la Déclaration d’utilité publique (DUP) qui, selon Monsieur Laimé, interdisait toute nouvelle construction.

Or, Monsieur Laimé a eu une lecture manifestement erronée de l’arrêté de DUP, puisque l’article 7.2 de cet arrêté précise clairement : « À l’intérieur du périmètre de protection rapprochée sont interdits : Toute nouvelle construction à l’exception de celles nécessaires au fonctionnement des remontées mécaniques existantes ».

La commune de Chamrousse a parfaitement respecté les prescriptions de l’arrêté en ne faisant réaliser que les travaux nécessaires au fonctionnement des remontées mécaniques. Aucun chantier n’a été réalisé dans le périmètre immédiat. Ce faisant la DUP a été parfaitement respectée.

Monsieur Laimé avance également que la qualité de l’eau de la retenue collinaire de la Grenouillère est médiocre sous-entendant un risque pour la santé des consommateurs.

Or, cette retenue n’étant pas destinée à alimenter directement un réseau d’eau potable, il n’y a donc rien de choquant à ce que la qualité attendue de cette réserve soit de type « qualité baignade ».

En tout état de cause, s’il s’avérait nécessaire d’utiliser cette ressource pour une alimentation en eau potable, un simple traitement de l’eau par rayonnement UV serait suffisant.

Monsieur Laimé feint de s’inquiéter que les points de prélèvements puissent se situer à proximité des ruisseaux

Concernant les analyses réalisées régulièrement, la Régie et la Commune s’en réfèrent strictement aux préconisations précises de l’ARS et de son hydrogéologue agréé qui ont prescrit des points de prélèvements multiples à des points précis sur la retenue et à plusieurs profondeurs, donc bien évidemment pas à « proximité des ruisseaux ».

La crainte de Monsieur Laimé est donc tout à fait infondée, purement artificielle, et uniquement destinée à susciter une polémique inutile.

Monsieur Laimé met également en doute la qualité des rapports d’analyse et l’impartialité de ceux-ci, concernant la qualité des eaux qui alimenteront en partie l’usine de fabrication de neige artificielle.

Il convient ici de rappeler que les prélèvements sont effectués et étudiés par un bureau d’analyse agréé par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC). Ce faisant, et contrairement aux insinuations particulièrement malveillantes de Monsieur Laimé, les résultats rendus par le bureau d’analyse, fusse-t-il privé, ne sauraient souffrir de la moindre contestation à moins d’en apporter la preuve scientifique, ce que l’auteur des lignes contestées se garde bien de faire tout au long de l’article. Le fait que VEOLIA effectue les prélèvements est un gage de qualité, cet organisme se devant d’être exemplaire dans la gestion de son corps de métier.

Les résultats ne sont donc pas « en dehors des clous ».

Enfin, la Commune de Chamrousse tient également à préciser, concernant la qualité de l’eau de la retenue, que, si la baignade est interdite, c’est uniquement en raison de d’impératifs de sécurité et non en raison de défaut de qualité de l’eau.

Monsieur Laimé insinue enfin que la procédure d’enquête publique aurait été menée de façon précipitée afin de limiter le droit d’information et de contestation des administrés.

Ici encore Monsieur Laimé, bien loin de justifier ses propos, se contente de lancer des accusations sans aucun fondement juridique ni même factuel.

Il convient ici de rappeler que la procédure d’enquête publique est codifiée aux articles L. 123-1 à L. 123-19 et R. 123-1 à R. 123-46 du code de l’environnement.

Au titre de l’article L. 123-9 de ce code « la durée de l’enquête publique ne peut être inférieure à trente jours ».

Par ailleurs, au titre de l’article L. 123.10 du code de l’environnement, quinze jours avant l’ouverture de l’enquête et tout au long de son déroulement, le maire doit informer le public, par tous les moyens possibles (affichage, presse écrite, communication audiovisuelle), de l’objet de l’enquête, de la décision pouvant être adoptée au terme de l’enquête et des autorités compétentes pour statuer, de l’existence d’une évaluation environnementale ou d’une étude d’impact, des noms et qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d’enquête, et lorsqu’il a été émis, de l’existence de l’avis de l’autorité administrative de l’État compétente en matière d’environnement.

Or contrairement à ce que prétend Monsieur Laimé, l’enquête publique s’est déroulée en totale conformité avec les dispositions du Code de l’environnement. Tant les délais d’information que ceux prescrits pour la réalisation de l’enquête ont été conformes aux exigences légales en la matière.

En conclusion, l’écrit rédigé par Monsieur Laimé est un article qui se soucie peu de la rigueur scientifique et juridique. Sous couvert d’information du public, l’article multiplie les inexactitudes et citations partielles pour créer une polémique artificielle.

Contrairement à l’interprétation de l’article, tous les intervenants et utilisateurs de l’espace ont été informés et associés aux réflexions et cela dès le début de la conception du projet d’aménagement de Casserousse.

Le syndicat des eaux gérant à l’époque la ressource de Fontfroide a été contacté (président et technicien), des réunions se sont tenues et les résultats des échanges ont été pris en compte. L’ARS (et son hydrogéologue agréé) a fait partie de la réflexion sur le projet dès le départ à l’instar de tous les services d’Etat concernés en conformité avec les dispositions légales et réglementaires applicables pour de telles opérations.

Concernant la conception des travaux, l’attention à porter sur la proximité des captages de Fontfroide avait été fortement prise en compte dans les cahiers des charges des entreprises qui comportaient des chapitres spécifiques relatifs aux précautions à prendre concernant les prescriptions de l’hydrogéologue agréé et les différents échanges avec le syndicat des eaux de Fontfroide.

 

[1] Le terme « germe » désigne ce mélange eau-air comprimé.

[2] Soit la consommation annuelle de 13 300 foyers français.

[3] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

[4] Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture.

[5] Centre d’étude la neige de Météo France.